Relecture de l'Évangile selon saint Jean, ch 4
Je voudrais vous parler ce soir d’un sacré bout de femme.
Quand on parle d’un sacré bout de femme, c’est en général qu’elle fait forte
impression !
Et c’est ce qu’elle me fait à moi, ce sacré bout de femme :
Femme de Dieu
Femme amante
Femme « ostensoir » aussi
Femme apôtre (même si elle n’a jamais été reconnue comme telle !)
Femme missionnaire qui à elle seule allait remuer toute une ville,
Que dis-je ? une montagne !
On pourrait croire à cet énoncé qu’il s’agit d’une grande dame d’Évangile ?
Serait-ce une des Marie ? celle de Nazareth ? Ou peut-être de Béthanie ?
Ou la vilaine de qui Jésus a chassé 7 démons ?
Et non… elle n’a pas de nom, d’ailleurs, cette bonne femme…
On ne l’a prénomme pas, on sait juste d’où elle vient, une femme de petite vertu.
On dirait d’elle qu’elle a le feu au… Non ! au cœur surtout !
Mais peut-être n’est-elle pas nommée justement pour rejoindre tous ceux qui brûlent
du même feu?
Je la vois arriver, sous ce soleil éclatant de midi ; elle a belle allure avec sa cruche
sur la tête qui lui donne une démarche si sûre, si fière…
Elle pensait arriver là sans voir personne et surtout pas les commères avec leurs ragots !
Qu’est-ce qu’elles savent de la soif qui ravage son cœur insatiable, d’ailleurs ? …
Sur quoi ergotent-elles au travers de leurs œillères qui ferment leur cœur ?
Plongée dans ses pensées, elle arrive au puits, très surprise d’y trouver quelqu’un…
Étonnamment, c’est un homme, juif de surcroit, avec toute cette condescendance, pour ne pas dire ce mépris qu’ont les juifs pour ces mécréants de samaritains…
Plus surprenant encore, ce juif lui demande à boire…
Cette humble demande ne cacherait-elle pas quelque chose de louche ?
Ne serait-ce pas des avances dans ce lieu réputé pour les rencontres amoureuses ? …
Du coup, c’est elle qui, avec toute sa franchise, lui répond :
« Comment, toi qui es juif, tu me demandes à boire ? »
Et Jésus lui réplique étrangement :
« Si tu savais le don de Dieu et qui est Celui qui te dit
« Donne-moi à boire »,
c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait
Donné de l’eau vive ».
Lui qui n’a rien pour puiser, prétend la désaltérer, d’eau vive, par-dessus le marché !!
De plus en plus surprise, elle lui demande :
« D’où as-tu cette eau vive ?
serais-tu plus grand que notre père Jacob qui nous a donné ce puits? »
Jésus lui répond :
« Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif,
mais celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai
n’aura plus jamais soif
et l’eau que je lui donnerai
deviendra en lui une source jaillissante pour la vie éternelle »
Par la suite, Jésus dira :
« Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive ».
ou « Celui qui croit en moi, des fleuves d’eau vive couleront de son sein »
Devant la femme décontenancée par ces paroles, Jésus lui dit :
« Va chercher ton mari »
Là, prise en faute, elle répond par la négative ; pourtant, Jésus ne porte pas de jugement sur sa vie dissolue, elle qui en est à son 6e mari…
Il veut l’amener à creuser cette soif d’amour qu’il veut combler.
Jésus ne serait-il pas son 7e, le bon, celui qui comblerait vraiment son cœur ?
Déstabilisée par cet homme-prophète, elle préfère quitter le champ de sa vie privée,
pour l’interroger à son tour sur un sujet qui fâche:
« Où faut-il adorer Dieu, au temple ou sur le mont Garizim ? »
Jésus n’élude pas la question ; il la déplace:
« Dieu est Esprit et ceux qui l’adorent,
c’est en esprit et en vérité »
Là, Jésus lui propose de descendre en esprit et en vérité dans son coeur, là où est son véritable désir, sa vraie soif.
Elle semble comprendre où Jésus l’emmène…et allant plus loin, elle l’interroge alors sur le Messie tant attendu :
« Lui, quand Il viendra, dit-elle, il nous dévoilera tout ! ».
C’est alors que Jésus lui fait cette réponse impressionnante et si rare dans les Évangiles :
« C’est Moi, Celui qui te parle ».
Cette révélation, Jésus l’adresse à une femme de petite vertu et qui plus est, étrangère.
Sidérée devant cette révélation, elle laisse là sa cruche pour s’encourir et annoncer à son peuple, sa rencontre avec le Messie,« le Sauveur du monde ».
Heureuse femme assoiffée qui éveille autour d’elle ce désir d’eau vivante, jaillissante
Heureuse femme qui nous invite à creuser notre soif, à chercher le puits où Jésus nous attend.
Ce puits sur la route de notre vie où un frère, une sœur nous dit : « Donne-moi à boire »
Comme si nous ne pouvions rencontrer Dieu qu’en étanchant les soifs de ceux que
nous rencontrons.
Comme si, de ce geste d’attention, de solidarité, nous recevions en retour :
« Une eau vive,
Source de la vie éternelle ».
Cette eau qui va à l’essentiel : l’amour, la vérité, la rencontre.
Essentiel que nous ne pouvons garder pour nous seul, qui n’existe que quand il est
partagé.
Eau reçue pour être répandue.
Heureuse es-tu femme de Samarie, de nous éveiller à cet essentiel, qui nous invite
aussi à entendre Jésus dire :
« J’ai soif !»
que ce soit au bord du puits ou sur la Croix.
« J’ai soif de te rencontrer, de te relever, de t’aimer tel que tu es,
soif de te réconcilier, de te pardonner, soif de ton amour et de ta joie. »
Sacrée bonne femme qui venait au puits à une heure où pensait-elle, elle ne rencontrerait personne.
Heureuse es-tu toi qui es devenue messagère de la Bonne Nouvelle.
Annette Rocour
Approchante
Fraternité "Dominique Pire"
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